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Emmanuel Macron se prononce en faveur de l’arrêt des livraisons d’armes à Israël pour la guerre à Gaza

Emmanuel Macron s’est dit, samedi 5 octobre, favorable à un arrêt des livraisons d’armes à Israël qui sont utilisées dans le conflit dans la bande de Gaza. « Je pense qu’aujourd’hui, la priorité, c’est qu’on revienne à une solution politique, qu’on cesse de livrer les armes pour mener les combats sur Gaza », a déclaré le chef de l’Etat lors de l’émission « Etcetera » sur France Inter. « La France n’en livre pas », a-t-il ajouté lors de cet entretien enregistré le 1er octobre.
« Si on appelle à un cessez-le-feu, la cohérence, c’est de ne pas fournir les armes de la guerre », a développé Emmanuel Macron plus tard samedi, en clôture d’un sommet de la francophonie à Paris.
Ces propos ont suscité la colère du premier ministre israélien, à deux jours de l’anniversaire des attaques du 7-Octobre. « Honte », a réagi Benyamin Nétanyahou à l’adresse du président français et des autres Occidentaux appelant à des embargos d’armes contre son pays. « Alors qu’Israël combat les forces de la barbarie dirigées par l’Iran, tous les pays civilisés devraient se tenir fermement aux côtés d’Israël », a-t-il poursuivi.
Les échanges ont rapidement pris des allures de crise entre les deux pays. A tel point que l’Elysée a publié dans la soirée une mise au point assurant que la France « est l’amie indéfectible d’Israël » et déplorant les mots « excessifs » de Benyamin Nétanyahou.
La présidence française y rappelle que Paris avait « mobilisé ses moyens militaires » pour aider à l’interception de missiles iraniens tirés contre Israël lors de l’attaque massive menée en début de semaine.
Le chef de l’Etat a aussi annoncé qu’il recevrait lundi, à l’Elysée, les familles d’otages franco-israéliens détenus à Gaza. Un an après l’attaque du Hamas contre Israël, qui a fait 1 205 morts, 97 personnes sont toujours retenues en captivité, dont 33 ont été déclarées mortes. En représailles, l’Etat hébreu a lancé une opération militaire qui a fait jusqu’ici au moins 41 825 morts dans la bande de Gaza, en majorité des civils, selon le gouvernement de Gaza dirigé par le Hamas.
En refusant tout cessez-le-feu, Benyamin Nétanyahou commet « une faute, y compris pour la sécurité d’Israël demain », a également dit Emmanuel Macron, samedi, sur France Inter, mettant en garde contre « un ressentiment qui est en train de naître, une haine qui est nourrie par cela ».
Prônant la « cohérence », le chef de l’Etat a aussi estimé « que ceux qui fournissent [des armes] ne peuvent pas chaque jour appeler à nos côtés au cessez-le-feu et continuer de les approvisionner ». Une remarque visant notamment les Etats-Unis.
Le président américain, Joe Biden, s’est jusqu’à présent refusé à user du levier de la fourniture d’armes à Israël, en dehors de la suspension d’une livraison de bombes en mai. Le Royaume-Uni a, pour sa part, annoncé, en septembre, la suspension d’une trentaine de licences d’exportation d’armes à Israël sur un total de 350, à la suite d’un examen concluant à « un risque » qu’elles soient utilisées en violation du droit humanitaire international dans le conflit entre Israël et le Hamas.
Jusqu’ici, la France n’avait jamais pris aussi clairement position en faveur d’un embargo sur les ventes d’armes à Israël. En avril, Sébastien Lecornu, ministre des armées, avait assuré qu’elles ne représentaient qu’un tout petit pourcentage des exportations françaises de défense : 0,2 %, sur un total de 27 milliards d’euros en 2022, soit autour de 15 millions d’euros pour les livraisons d’armement, et 34 millions d’euros, sur un total de 8,8 milliards, pour les biens dits à « double usage ». Ces licences concernent « essentiellement des transferts de pièces détachées », disait-il.
Mais ces transferts recouvrent une large gamme de composants, parfois clés pour la fabrication d’équipements plus complexes. Le 26 mars, le média d’investigation Disclose et le site Marsactu ont ainsi dévoilé la présence, dans le port de Marseille, d’une cargaison de maillons pour des munitions de petit calibre, destinée à une filiale du géant de la défense israélien Elbit. S’il est apparu que la licence accordée permettait seulement, selon le ministère des armées, de la réexportation à des pays tiers, et pas d’usage par l’armée israélienne, ces informations ont mis en lumière l’ambiguïté des échanges diplomatico-militaires entre la France et l’Etat hébreu.
Samedi, tout en reconnaissant le droit d’Israël à se défendre face au Hezbollah, le président français a par ailleurs critiqué les opérations israéliennes au sol au Liban. « Je regrette que le premier ministre Nétanyahou ait fait un autre choix [que le cessez-le-feu proposé par Paris et Washington], ait pris cette responsabilité, en particulier d’opérations terrestres sur le sol libanais », a-t-il déclaré. Emmanuel Macron a rappelé que la « priorité est d’éviter l’escalade ». « Le peuple libanais ne peut pas à son tour être sacrifié et le Liban ne peut pas devenir un nouveau Gaza », a-t-il martelé.
Le Qatar, un médiateur clé dans les pourparlers sur le cessez-le-feu à Gaza, a estimé que la déclaration de M. Macron était « un pas important et apprécié vers l’arrêt de la guerre », tandis que la Jordanie a salué l’appel du dirigeant français.
Les déclarations du chef de l’Etat ont été plutôt bien accueillies à gauche. Le patron du Parti socialiste, Olivier Faure, a exprimé son soulagement sur le réseau social X : « Enfin et tant mieux si la France peut parler d’une seule voix ! » « Oui, il faut cesser de livrer des armes à Israël comme nous le disons depuis des mois », a également réagi le coordinateur de La France insoumise, Manuel Bompard, appelant cependant à « sortir de phrases sans effet » car « seuls les actes comptent » et réclamant en outre des « sanctions contre le gouvernement de Nétanyahou ».
La cheffe des députés écologistes, Cyrielle Chatelain, a elle aussi estimé que la France doit aller plus loin et « arrêter toutes les livraisons d’armes à Israël » dont l’armée « commet des crimes de guerre ».
A l’inverse, Julien Odoul, porte-parole du Rassemblement national, a dénoncé un changement de pied « irresponsable et criminel », rappelant qu’après les attaques du 7-Octobre, le chef de l’Etat « voulait monter une grande alliance militaire internationale contre les terroristes du Hamas », tandis qu’« un an après, alors que l’Etat d’Israël est attaqué de tous côtés, Macron veut le désarmer ».
De son côté, le Conseil représentatif des institutions juives de France a « vivement » déploré les propos du chef de l’Etat : « appeler à priver Israël d’armes, ce n’est pas faire le jeu de la paix, cela revient à faire le jeu du Hamas et du Hezbollah ! »
Le Monde avec AFP
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